samedi 2 octobre 2010

Du Sartre ? Vous m'en mettrez un kilo !


J’adore cette histoire racontée par Alain Beuve-Méry dans sa critique du "Monde des livres" de l’ouvrage intitulé « Minuit » qui vient de paraître chez Grasset sous la signature de Dan Franck. Le livre est consacré aux artistes et écrivains français sous l’Occupation, collabos, résistants ou entre les deux.

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Mais à quoi donc peut tenir un succès de librairie ? L'Etre et le Néant est paru pour la première fois en France en juin 1943. Jean Paulhan avait usé de son influence auprès de Gaston Gallimard. Le pavé philosophique de Jean-Paul Sartre ne serait pas, à coup sûr, un succès commercial, mais il fallait le publier. Pour le fond, pour le prestige !

De fait, la première semaine, il ne s'en vendit que trois exemplaires, puis cinq, puis deux, quand soudain les ventes décolèrent : 600 en un seul jour, puis 700, 1 000, 2 000 exemplaires. Certes, sous l'Occupation, les Parisiens avaient le temps de lire, mais de là à devenir existentialistes... La maison Gallimard fit une enquête. Les femmes achetaient plus volontiers ce titre que les hommes. Qui plus est, elles l'achetaient souvent en double. Les femmes ? Pas exactement, plutôt les ménagères qui s'en servaient pour équilibrer leur balance, car L'Etre et le Néant pesait tout juste un kilo. Un volume remplaçait utilement les poids en cuivre, qui avaient été fondus.

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© "Le Monde"

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