samedi 16 avril 2011

La journée du disquaire

C’est la «journée du disquaire». Apparue d’abord aux Etats-Unis, au Canada et en Grande-Bretagne, elle est organisée pour la première fois en France et dans une dizaine de pays européens. Elle met à l’honneur les disquaires indépendants qui mettent en vente ce jour-là des éditions à tirage limité (45-tours et 33-tours, CD, cassettes audio) avec des chansons spécialement enregistrées, des rééditions de disques de collections, des parutions en avant-première, etc. Plus de cent magasins participent au premier ‘Disquaire Day’ en France.

C’est un métier qui se meurt, malgré un regain d’intérêt pour le vinyl et les labels indépendants. Il n’y a plus en France qu’environ 200 petits disquaires. Le reste de la production est écoulé par les chaines spécialisées (FNAC, Virgin) et surtout par les grandes surfaces qui n’accordent de place qu’aux grands succès. Les rayons de disques rétrécissent à vue d’œil.
A New York, les magasins «Tower Records» qui avaient naguère fait mon bonheur ont tous disparu. La société a fait faillite, victime du digital et de la musique dématérialisée.
Je me souviens aussi du mythique magasin «Tower Records» de Los Angeles, sur Sunset Boulevard, à West Hollywood. Cette succursale était fréquentée par tout le show-biz et le petit monde du cinéma. Le magasin a été détruit


Même le Virgin Megastore de Times Square à New York, ouvert avec fracas dans les années 90, n'a pas résisté au marasme. Il a fermé, lui aussi. Ces dernières années, on y trouvait de moins en moins de CD, de plus en plus de souvenirs cheap et des tee-shirts pour touristes. Les DVD lui avaient permis de prolonger l'agonie. Mais, là encore, le DVD est en train de disparaitre, au profit de la vidéo à la demande qui également éradiqué les video-stores.


Un site un peu tristounet (cliquez ici) montre les façades d'une quarantaine de magasins de disques qui ont baissé définitivement leur rideau de fer, aux Etats-Unis et au Canada.
Pour célébrer à ma manière cette «journée du disquaire», je republie ici un petit texte écrit en 2004.
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­­­­­­­­­­­­­­Je range mes disques vinyl, ressurgis des oubliettes à la faveur du déménagement. Je retrouve même ma vieille platine tourne-disque. Elle fonctionne encore. Je la connecte à ma chaîne. J’y raccorde aussi mon antique magnéto à bande (pas à cassettes, vraiment à bande). Le tout me procure des sources sonores que je croyais perdues, des trésors engloutis qui remontent à la surface.

C’est cela vieillir : voir les technologies se succéder, s’anéantir dans un certain mépris. Du neuf, toujours du neuf. A mon âge, j’ai vu la fin du 78 tours, si lourd et qui cassait à la première chute. Pour l’intégralité de la 9ème de Beethoven, il fallait une dizaine de disques. La musique s’arrêtait en plein milieu d’un mouvement. On écoutait la suite sur le disque suivant. C’était étrange et frustrant.

Puis le microsillon s’est imposé. C’était beaucoup mieux, même si les rayures et la poussière gâchaient le plaisir. Mais le 9ème tenait en deux disques recto-verso. Il y avait aussi les 45 tours. Il ne fallait pas perdre la petite rondelle pour combler le trou au milieu du disque. Pour les 33 tours, les pochettes étaient souvent belles.

Certaines sont devenues mythiques. Dans ma collection, je retrouve avec joie des merveilles oubliées. Je ne savais pas que je possédais un vieux Bob Dylan, tirage américain d’origine en parfait état. J’ai aussi un pressage anglais de 1967 de Sergeant Pepper’s des Beatles. J’ignore en revanche pourquoi je me retrouve avec un album d’Herbert Léonard.
Parallèlement au vinyl, la bande magnétique est devenue le moyen de faire des copies. Moi j’étais dingue de la bande magnétique avec les grandes bobines et les ciseaux de montages pour faire de « pots-pourris » musicaux. J’ai encore des dizaines de ces assemblages qui portent témoignage de mes goûts de l’époque : Pink Floyd, Léo Ferré, Modern Jazz Quartet et aussi de la variété française.

Avec la bande magnétique, la cassette s’est aussi répandue. Mais le son était moins pur et le fin ruban était si fragile. Il se distordait, se cassait. La cassette est en train de finir de disparaître. Elle aura vécu plus longtemps que la fugace cartouche des années 60, surtout utilisée aux Etats-Unis et qui n’a jamais percé chez nous.

Après le vinyl et la bande magnétique analogique, la rupture, au début des années 80, ce fut bien sûr l’irruption du digital. Le compact disc a tout balayé mais il est déjà en train de rendre l’âme. Dans une dizaine d’années, les CD seront aussi obsolètes que mes vinyls. J’avais cru et pas mal investi dans la technologie du Mini-Disc, remplacement possible de la cassette mais sur le mode digital. J’en ai beaucoup enregistré, reprenant mes habitudes de « collages » réalisés jadis avec la bande magnétique. Mais le Mini-Disc a peu séduit en Europe alors qu’il est très prisé au Japon d’où il vient.

A présent, nous sommes dans l’ère de la musique digitalisée : sur les ordinateurs, sur les baladeurs MP3.

La matérialité de la musique disparaît. C’en est fini des pochettes illustrées de mes 33 tours. La musique n’est plus un objet. J’ai choisi, en rebranchant ma chaîne, de tout intégrer et d’avoir le choix complet : microsillon, CD, Mini Disc, bande magnétique, cassette. Et même un truc un peu ancien qui marche toujours : la radio. Oui, la radio, tout simplement.
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Voilà ce que j’écrivais en 2004. J’ai changé d’avis. Toute cette installation antique prend trop de place. Et la vérité est que je ne me sers plus jamais de cette usine à gaz. J’écoute de la musique sur mon ordinateur ou sur mon Iphone. 


J’ai honte de le dire en cette «journée du disquaire» : je vais mettre au placard le matériel du siècle dernier. La nostalgie n’est plus ce qu’elle était... 

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