"Ce qui barre la route fait faire du chemin" (Jean de La Bruyère - 'Les Caractères')

dimanche 8 mai 2011

François-Marie Banier éclairé par Jean-Marc Roberts, son ami.

Dans cette maudite affaire Bettencourt, j’ai toujours pensé que le seul personnage intéressant et finalement respectable était François-Marie Banier. 

L’écrivain Jean-Marc Roberts me conforte dans cette impression en publiant un petit livre qui a les honneurs de la collection blanche de Gallimard.
Le mince ouvrage s’intitule sobrement «François-Marie». Jean-Marc Roberts est assez bien placé pour parler de Banier qu’il connaît depuis leur jeunesse commune, du temps des farces, des frasques et de l’insouciance.


Le livre est accompagné d'un "bandeau" où figure une photo ancienne, prise sur une embarcation de la "Rivière enchantée" du Jardin d'Acclimatation.
(de gauche à droite : Roberts, Banier, l'acteur Pascal Greggory -pas encore amant de Banier-, la femme de Roberts Bettina, le décorateur Jacques Grange -amant de Banier-)

Longtemps après cette image de jeunesse, Jean-Marc Roberts écrit à Banier une étrange lettre d’amour de 90 pages, pleine de tendresse, de ferveur et d’intensité. Banier n’a pas besoin du plaidoyer d’un avocat. Banier n’est pas un criminel. C’est un lutin, un enfant, un petit Raspoutine enjôleur.

(Banier jeune)
Il avait jadis charmé un Salvador Dali gâteux puis Aragon, enfin débarrassé des yeux d’Elsa. Ensuite, ce fut Cardin et quelques autres. Ces dernières années, il a fait rire Liliane dans sa forteresse friquée de Neuilly. Banier, tel que nous le raconte Roberts, est un feu follet. Un fou pas méchant. Une folle aussi, mais ça tout le monde le sait.

La presse, toujours prompte à désigner les salauds, s’est emparée du personnage en le dépeignant comme un capteur de fortune : la sangsue accrochée au milliard légué par la vieille dame. Grossière erreur, nous dit Roberts : Banier est prodigue et généreux, pas du tout calculateur. Et je veux bien le croire. Banier aime les gros chèques mais la vraie obsession pour le fric, elle est du côté de la firme cosmétique. Chez l'Oréal, l'argent n'est pas seulement un parfum. C'est une odeur, imprégnée de certitudes anciennes.

La réconciliation douteuse et précipitée du clan Bettencourt s’est faite autour d’une table de conseil d’administration dans un décor de coffres-forts. Elle s’est faite contre Banier, brutalement écarté comme un vilain petit canard. Pire : comme un virus pernicieux, une menace exogène.

On a jugé Banier avec les critères de la morale bourgeoise qu’il pervertit par sa seule présence : l’intrus, le parasite, l’usurpateur. Il faudrait revoir Théorème de Pasolini pour mieux comprendre. Ce film incroyablement prémonitoire fit scandale à sa sortie en 1968.

Banier, ancien archange aux cheveux bouclés devenu sexagénaire, reste un ado immature qui folâtre encore.

L’affaire Bettencourt, désormais pratiquement enterrée par la justice, se résume à un fait-divers politico-financier sordide, peuplé de personnages grisâtres : un ministre menteur, des avocats avides, des capitalistes haineux comptant leurs jetons de présence. Banier faisait tache dans la distribution de cette mauvaise pièce. Il n’y avait pas sa place. Il a été congédié, comme un domestique. Il semble en être soulagé.
(François-Marie Banier et Jean-Marc Roberts)

J’ai lu quelques romans de Banier. Les premiers étaient prometteurs. Mais il ne restera sans doute pas comme un écrivain majeur. J’attends toutefois la publication de son journal intime qui peut nous révéler de bonnes surprises.

Son œuvre photographique n’est pas non plus exceptionnelle. D’ailleurs, sans le soutien sonnant et trébuchant de l’Oréal, les photos de Banier n’auraient jamais été exposées. Sur le marché de l’art, les images de Banier ne se vendent pas.

La vraie réussite de Banier, c’est sa vie, ses rencontres, ses excès, sa fantaisie et surtout sa disponibilité envers des gens –parfois riches- qui s’ennuyaient avec élégance dans leurs salons dorés.

Le meilleur roman de Banier, c’est Banier lui-même. Il est intrinsèquement romanesque. Chez Balzac, il ne serait pas Rastignac mais Lucien de Rubempré dans «Les illusions perdues» et surtout dans «Splendeurs et misères des courtisanes».

(Liliane Bettencourt)
Notre époque est mortifère, codifiée, horriblement prévisible. On manque de perturbateurs, de zozos qui pissent dans les plates-bandes (comme Banier le faisait dans le jardin de Liliane).

Je suis sûr que la vieille dame sourde de Neuilly regrette à présent les visites de François-Marie et qu’elle s’emmerde ferme avec tout son pognon surveillé par sa fille et son gendre, comme le lait sur le feu.

(Jean-Marc Roberts)
Un milliard, qu’est ce que c’est quand on en a plusieurs ? Tout est une question d’échelle. Banier n’a pas spolié la Sécurité Sociale ni fraudé le fisc et encore moins braqué des banques. Pendant toute son existence, il a diverti quelques personnes riches ou célèbres par son esprit, son humour cinglant et, disons-le, sa grâce personnelle.

J’ai de la sympathie pour François-Marie Banier et je suis reconnaissant à Jean-Marc Roberts de nous éclairer sur la personnalité de son vieil ami, espiègle et fanfaron, mais pas malfaisant pour deux sous. Ni pour un milliard.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai adoré lu d'une traite : infréquentable(s) pour le vulgus pecus,mais bravo à JM. Roberts : il avait été invité à une émission (laquelle oublié) où on ne lui a même pas donné la parole.
Je suis une "vieille" j'aurais aimé être distraite par un F.M.B!
De plus en plus il faut absolument être dans "le moule" sinon on est coupable, forcément coupable...

yanmaneee a dit…

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Anonyme a dit…

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