Après beaucoup d'atermoiements, j’ai finalement vu «La Conquête», le film de Xavier Durringer retraçant le cheminement de Nicolas Sarkozy vers l’Elysée.
D’abord, soulignons le travail remarquable de Denis Podalydès, l’acteur qui incarne Sarkozy. Il réussit à camper le personnage de manière crédible et attachante. Podalydès ne sombre pas dans l’imitation ou la caricature. Il s’est approprié Sarkozy dans sa fougue, sa hargne de gagner et ses fragilités. C’est le meilleur du film.
Florence Pernel joue Cécilia. Elle en fait une femme probablement plus intéressante, plus combative et plus complexe que le modèle original.
Pour le reste, les personnages secondaires (Chirac, Villepin et les autres) apparaissent comme des numéros de cabaret. Ils ont la dimension de silhouettes brossées grossièrement par des chansonniers. C’est médiocre. C’est guignol.
La grande faiblesse du film, ce sont les dialogues : un collage de citations connues qui semblent à la fois grandiloquentes et artificielles, même si elles sont extraites de la réalité. Personne, dans la vie réelle, ne parle en permanence en proférant des «petites phrases» ciselées.
Le pire, c’est la réalisation d’une pauvreté infinie, propre au cinéma français commercial. Par exemple, la soirée de la victoire au Fouquet’s, pourtant essentielle et riche en intensité dramatique, est filmée d’une façon très «cheap» avec des figurants sans épaisseur et un décor de pacotille.
Je n’ai ressenti aucun souffle, aucune progression dramatique, aucune vision d’ensemble. Xavier Durringer nous offre un téléfilm poussif digne de France 3 un jour de pluie.
C’est moche et mécanique, sans aucune réflexion sur le pouvoir. Le tout tombe à plat, même si on s’amuse en observant la recréation d’épisodes cocasses et célèbres (comme la baignade de Villepin à La Baule).
Le film est une collection d’anecdotes qui ne sont jamais mises en perspective. On reste dans le superficiel et l’anodin.
Nicolas Sarkozy aurait tort de s’inquiéter de la portée de ce film. Ce film n’a pas de portée. Sarkozy en ressort intact et presque grandi. Il en devient sympathique : il souffre du désamour de Cécilia. Il est entouré de conseillers falots. Il triomphe dans l’adversité, celle de son histoire intime et sentimentale. Sur la politique, il est évidemment le plus fort.
Bizarrement et sans doute contre la volonté de ses auteurs maladroits, «La Conquête» est un film sarkozyste. Je suggère à Nicolas Sarkozy de le faire projeter avant chacun de ses meetings de la prochaine campagne.
Grâce à un tel clip électoral, il gagnera encore.