"Ce qui barre la route fait faire du chemin" (Jean de La Bruyère - 'Les Caractères')

vendredi 5 novembre 2010

Copé, Hirsch, Mélenchon et Laurence Ferrari parlent argent.


Je vous propose aujourd’hui un feuilleton autour de l’argent dans la politique et les médias.

J’ai rassemblé plusieurs documents qui vont nous conduire de Martin Hirsch à Laurence Ferrari en passant par Jean-François Copé et Jean-Luc Mélenchon.

Cela commence par la mesquinerie de trois députés de l’UMP qui ont décidé de sabrer dans la rémunération de Martin Hirsch, actuel président de l’Agence du service civique. Petite vengeance inspirée par Jean-François Copé, président du groupe UMP à l’Assemblée et bientôt secrétaire général du parti tout entier, à la place de Xavier Bertrand qui devrait revenir au gouvernement à l’occasion du remaniement.

Hirsch qui a quitté récemment le gouvernement a écrit un livre assez cinglant dans lequel il brocarde les cumulards, en citant en particulier la situation de Jean-François Copé (trois mandats électifs et un travail d’avocat très rémunérateur).

L’entourage de Copé indique qu’il est nécessaire, en ce qui concerne la réduction drastique des émoluments de Martin Hirsch, de « moraliser la vie politique ».

En parlant de « moralisation », Laurence Ferrari lorsqu’elle était encore sur Canal+ il y a deux ans avait interrogé frontalement Jean-François Copé sur son accumulation d’activités. Copé avait répliqué, non sans un certain agacement, en soulignant que la journaliste était aussi, à sa façon, une cumularde. « Mais je ne suis pas élue du peuple », avait fait remarquer Laurence Ferrari.

Ce feuilleton pognon connaît un rebondissement récent avec les déclarations de Jean-Luc Mélenchon qui affirme que Laurence Ferrari (actuellement en congé maternité) gagne plus d’un million d’euros par an. C’est sans doute beaucoup moins, même si la somme demeure rondelette.

Pour bien comprendre, voici donc les documents promis. Vous en tirerez vous-même les conclusions.

1/ Tentative de rabotage de la rémunération de Martin Hirsch par l’UMP (dépêche AFP du 4 Novembre 2010)

Des députés UMP veulent se venger de Hirsch en sabrant sa rémunération

(par Frédéric Dumoulin-AFP)

PARIS — Des députés UMP veulent, sous la houlette de leur patron Jean-François Copé, sabrer la rémunération du président de l'Agence du service civique, Martin Hirsch, en représailles contre son livre sur les conflits d'intérêt, qui ne les ménageait pas.

Trois d'entre eux --Bernard Debré, Louis Giscard d'Estaing et Nicolas Dhuicq-- ont déposé un amendement au budget 2011, dont l'AFP a obtenu copie, pour "réduire à un niveau symbolique" les émoluments de l'ex-Haut commissaire aux Solidarités actives.

Cet amendement, qui sera débattu vendredi pendant l'examen des crédits "Sport, jeunesse et vie associative", vise à transférer "160.000 euros" de crédits alloués à l'Agence du service civique à ceux dévolus au sport.

"Il nous semble opportun de réduire cette rémunération du président de l'Agence à un niveau symbolique afin de redéployer ces crédits à des actions concrètes en faveur du sport pour les jeunes", soulignent ses auteurs.

Ils font valoir que la rémunération de la présidence de cette agence fait "exception" aux autres "groupements d'intérêt public (GIP) comme le GIP Info retraite, le GIP Enfance en danger ou le GIP Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique".

Leur amendement a toutefois peu de chances d'être voté, selon une source parlementaire.

L'Agence du service civique a été créée par la loi du 12 mai 2010 qui prévoit que "le président peut percevoir une rémunération dont le montant est fixé par décision des ministres chargés du budget et de la jeunesse". La rémunération de M. Hirsch s'élèverait à environ 9.200 euros net par mois.

Les députés UMP "instrumentalisent la loi pour faire régner la loi du silence", s'est insurgé auprès de l'AFP M. Hirsch, auteur en septembre d'un livre contre les conflits d'intérêt qui lui a valu les foudres des parlementaires UMP et de certains de ses ex-collègues du gouvernement.

Il y épinglait notamment M. Copé pour ses activités d'avocat d'affaires et le président du groupe UMP au Sénat, Gérard Longuet. M. Copé avait alors dénoncé un "exercice de délation", accusant M. Hirsch d'avoir pratiqué "le plus joli conflit d'intérêts" en faisant voter la loi prévoyant la création de l'Agence qu'il devait ensuite diriger.

"On m'accuse de crime de lèse-conflit d'intérêts. La prochaine étape sera-t-elle la déchéance de ma nationalité française puisque cette offensive fait suite à celle selon laquelle on voudrait que je n'aie pas le droit de parler de conflits d'intérêts parce que mes parents ont été des réfugiés pendant la guerre ?", s'interroge encore M. Hirsch.

M. Dhuicq, signataire de l'amendement, a déclaré à l'AFP qu'il s'en était entretenu avec M. Copé. "Cela s'inscrit dans l'optique de Jean-François Copé de moraliser la vie publique", a précisé le député de l'Aube, membre du club politique de M. Copé Génération France.

"Cette initiative est totalement assumée. Elle vise à démontrer qu'il n'y a pas d'automaticité à la rémunération des dirigeants de GIP. Il s'agit aussi de montrer que la rémunération de M. Hirsch est largement supérieure à celle d'un député", a-t-on ajouté dans l'entourage de M. Copé.

"Je n'ai aucun intérêt financier à être à l'Agence. Je ne suis pas plus rémunéré qu'il y a dix ans, dans mon corps d'origine, le Conseil d'Etat", a rétorqué M. Hirsch.

2/ Copé très occupé et bien payé (extrait du mensuel « Capital » de Mai 2009)

En mai 2008, Laurence Ferrari et Jean-François Copé avaient eu un échange musclé à propos du cumul des mandats dans le magazine Dimanche +. La journaliste avait été particulièrement mordant et Jean-François Copé avait tenté de se justifier comme il le pouvait : “"Je suis partisan de la limitation à deux mandats, un mandat local et un mandat national et croyez-moi, c'est aussi une bonne manière de servir la démocratie, vous n'imaginez pas comme c'est utile quand on est élu à l'échelon national d'avoir les pieds sur terre quand on est maire et pour ce qui concerne mon activité professionnelle, effectivement je suis avocat, je ne suis pas le premier à l'être. Beaucoup de parlementaires de droite et de gauche le sont. Moi j'ai eu le droit à un petit traitement un peu personnalisé il y a quelques mois".
En cumulant trois fonctions électives, Jean-François Copé dépasse le plafond des indemnités. Pour ses mandats de député, maire et président de communauté d'agglomération, Copé touche 9 730 euros brut par mois. Moins qu'un secrétaire d'Etat au gouvernement.

Parallèlement à ses activités politiques, Jean-François Copé est devenu avocat d'affaire en 2007. A l'époque, les députés UMP avaient grincé des dents face au dilettantisme du président du groupe UMP. Depuis, Copé a resserré les rangs et réussi à concilier ses activités politiques et sa toute nouvelle carrière d'avocat à temps partiel. D'autres responsables politiques l'ont imité par la suite en accédant à la carrière d'avocat, comme Dominique de Villepin ou Noël Mamère. Mais pourquoi Copé a-t-il voulu devenir avocat ? A la différence de ses activités politiques, Jean-François Copé n'a pas de limites de ressources pour ses honoraires. Et si l'on en croit le magazine Capital qui cite l'un des fondateurs du cabinet Gide Loyrette Nouel, ce job à temps partiel est une véritable manne financière : “"le contrat assurerait à Copé 200 000 euros d'honoraires fixes par an. Sa tâche principale ? User de son influence pour faire la médiation entre des sociétés françaises et des Etats étrangers"”.

Autrement dit, Jean-François Copé gagnerait 9 730 euros brut par mois pour ses activités politiques et 16 600 euros brut par mois pour son activité d'avocat. Avec un revenu mensuel d'environ 26 330 euros brut par mois, Copé gagnerait plus... que le président de la République.


3/ L’échange nerveux entre Copé et Ferrari sur Canal+ en Mai 2008 (dans l’émission «Dimanche+»)

Copé : "Si je peux me permettre, j'ai assez mal pris la formule pour lancer le reportage, mais je sais que vous faîtes un métier difficile, qui a consisté à dire : Petits arrangements entre amis".



Ferrari : "On n'est jamais mieux servi que par soi-même en même temps".



Copé : "D’abord, vérifiez que vous ne vous l'êtes jamais appliqué à vous-même ce petit principe, et puis deuxièmement, vous faites partie des gens qui aimez cumuler aussi. Vous avez bien raison, j'admire votre carrière, Laurence. Vous êtes une remarquable journaliste entrepreneuse et vous faites cela très bien. Bravo, mais vérifions les uns et les autres, quand on en parle, que l'on se l'applique bien à soi-même".



Ferrari : "Mais je ne suis pas élue du peuple, en même temps".



Copé : "Et alors, So what, quelle est la difficulté ?"



Ferrari : "Tout est la différence..."

4/ Jean-Luc Mélenchon s’attaque sur RMC (le 26 octobre) au salaire de Laurence Ferrari et évoque... Maurras.

La présentatrice du 20h de TF1 - actuellement en congé maternité - avait indiqué que le président du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, n'avait ni programme. Celui-ci avait alors répondant en traitant le journaliste de TF1 de« perruche » ne savchant pas lire correctement son livre. Sur RMC, le député en a remis une couche...

« Celle qui m'a insulté sur un plateau de télévision gagne 1,1 million d'euros par an. Elle part en congé maternité pendant que des matermittentes (sic) par centaine sur son propre média n'ont même pas le droit d'être ni au chômage, ni en congé maternité. C'est contre cette injustice-là que vous me trouverez toujours. Ils ne m'impressionnent pas ; ils peuvent se mettre un millier à hurler contre moi, je serai toujours aux côtés des petits », a-t-il indiqué dans l'émission ‘Les grandes gueules.’

« Cette femme a osé dire sur un plateau télé - sans qu'un seul de ses confrères ne lui disent "Mais vous êtes devenue folle !" -, elle dit "Les politiques passent, les chaînes restent" ; et bien c'est du Maurras traduit dans la langue de 2010 », a-t-il ajouté.

5 /Mais quel est le vrai salaire de Laurence Ferrari ?

TF1 a tenu à réagir en déclarant au site du Point: "Laurence Ferrari ne gagne pas 1,1 million d'euros par an".

Concernant la rémunération de la journaliste, le chiffre serait de l'ordre de 30.000 euros par mois selon ‘le Point’. Soit 400.000 euros annuels.

Presque deux fois plus que Jean-François Copé.... Mais, comme l’a dit la journaliste, toute la différence, c’est qu’elle n’est pas l’élue du peuple.

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