"Ce qui barre la route fait faire du chemin" (Jean de La Bruyère - 'Les Caractères')

samedi 22 décembre 2007

La voix de son maître


Après Cécilia, plutôt grande gueule, Nicolas a enfin trouvé avec Carla Bruni une compagne idéale : une femme sans voix.

lundi 17 décembre 2007

Mickey se fait mousser


Après le Fouquet's au printemps, voici Disneyworld en hiver. Rien ne nous sera épargné. Le Sarko-show n'évite aucun décor en toc.



Dernière trouvaille publicitaire pour que bon peuple oublie le passage prolongé et désastreux de Kadhafi sur notre territoire, l'Elysée nous offre une suite pimentée au feuilleton romancé de la présidence : le flirt de Nicolas avec Carla Bruni, ex-top model et chanteuse à guitare, sur fond de faux château de la Belle au Bois Dormant à Marne-la-Vallée.



Malgré son tout petit filet de voix, Carla en a pêché, des hommes ! La plus récente prise n'est pas la moindre même si ce n'est pas la plus sexy.



J'ai trouvé tout à l'heure, sur le trottoir de la boutique Prada de l'Avenue Montaigne, un CD en miettes qui semblait jeté rageusement de la fenêtre d'une Mini-Cooper garée à proximité. C'était un CD de Carla Bruni. Je me demande si la Mini-Cooper n'était pas celle de Cécilia.

dimanche 16 décembre 2007

'Once' upon a time in the "Quartier Latin".


Samedi soir, j'ai rajeuni de 30 ans. J'ai fait un truc que je n'avais pas fait depuis trois décennies : je suis allé voir un film dans une petite salle du Quartier Latin.



Je ne vais presque jamais au cinéma le samedi soir : trop de monde, trop de cons, trop de jeunes cons surtout qui parlent pendant la séance et mangent bruyamment des chips ou dépiautent à l'infini les emballages très sonores de caramels mous.



Un ami me dit souvent : "tu seras un mauvais vieux". Je le suis déjà. Toujours une longueur d'avance !



Mais je reviens à mes moutons : je ne vais presque jamais au Quartier Latin. Les restos grecs attrape-gogos de la rue de la Huchette, les touristes en maraude persuadés qu'ils sont au cœur du Paris typique, les boutiques de mauvaises fringues du Boul'Mich, tout ça je déteste.



J'ai noté au passage, ce samedi soir, que "Le Grand Café de Cluny", où j'avais un grand souvenir personnel (une rencontre), est maintenant remplacé par une succursale de "La Brioche Dorée". Tout fout le camp. Les grands bistrots parisiens sont supplantés par le fast-food maquillé franchouillard ! Ah, la mondialisation n'a pas que du bon !



Mais j'ai donc tenté l'aventure extrême : je suis allé au cinéma un samedi soir au Quartier Latin !



Je n'avais guère le choix : la seule salle qui projetait encore le film que je voulais voir était justement au Quartier Latin.



Ceci, au passage, en dit long sur la distribution du cinéma en France, même à Paris. Le film que je voulais voir est sorti il y a moins d'un mois. Il faut déjà partir en expédition, dans un quartier hostile et détesté, pour avoir une petite chance de le voir ! Alors que toutes sortes de saloperies occupent indûment et indéfiniment la plupart des écrans.



La salle où je me suis rendu s'appelle "Reflet Médicis" et elle se trouve rue Champollion. Tout est "vintage" (suranné en français) dans cette appellation. "Reflet Médicis", plus ringard tu meurs comme nom de cinéma ! Et la rue Champollion, c'est une adresse tellement historique, tellement datée.



Au début de la rue, il y a un autre cinéma qui s'appelle le "Champo". C'est une salle jadis légendaire qui projette actuellement une grosse daube bien baveuse du cinéma français : "L'Auberge Rouge" avec Clavier, Jugnot et Balasko. Vous voyez le genre de raclure française dont il s'agit ! Le "Champo" projette cette grosse bouse. Le "Champo" est tombé bien bas.



Mais je n'allais heureusement pas au "Champo". J'allais quelques dizaines de mètres plus loin, j'allais au "Reflet Médicis". A la séance de 20 heures, j'allais voir un tout petit film irlandais intitulé "ONCE".



La critique à propos de ce film est excellente dans le monde entier. Le "New York Times" a été dithyrambique, la presse française tout autant, à part Thomas Sotinel, le pénible tâcheron malheureusement chargé du cinoche au journal "Le Monde". Sotinel, je crois qu'il est du genre à aimer "L'Auberge Rouge". Tant pis pour lui.



Alors, "Once", de quoi s'agit-il ? D'un film qui dure une heure et 25 minutes. Ça, c'est déjà une bonne nouvelle. Pas la peine de s'étaler pendant plus de deux plombes pour s'exprimer avec des images.



C'est un film réalisé à Dublin par un certain John Carney, totalement inconnu, mais très remarqué au festival de Sundance, l'hiver dernier.



Les interprètes sont Glen Hansard et Markéta Irglová, également parfaitement inconnus.



Enfin un film sans Will Smith ou Angelina Jolie !



L'histoire tient en quelques mots : un chanteur des rues, par ailleurs réparateur d'aspirateurs, rencontre à Dublin une immigrée tchèque également éprise de musique. Ils vont chanter ensemble et ils vont s'aimer brièvement et chastement. Le film se termine par une sorte de "happy end" un peu mélancolique. On croit qu'ils vont se marier et avoir beaucoup d'enfants. Mais la vraie vie est plus complexe. Et le film le prouve. Et c'est sa force.



Il y a l'histoire. Il y a surtout aussi la musique, les chansons magnifiques, des interprètes d'une grande fraîcheur, d'une grande vérité.



La réalisation, visiblement très fauchée, est pourtant incertaine. La caméra sur l'épaule, l'éclairage sommaire, le 16 mm gonflé (les spécialistes comprendront), tout cela pourrait être insupportable.



Mais non. Parce que le réalisateur et ses acteurs-chanteurs nous racontent une vraie histoire, une vraie et belle histoire, subtile, imprévisible.



Je suis sorti vers 22 heures du "Reflet Médicis". Tous les spectateurs étaient contents, ravis, épanouis, comme je l'étais.



Ça se voit une salle de cinéma qui a passé un bon moment. Pas de crétins qui mangent des bonbons dans le noir en faisant du bruit. Une salle qui a partagé un instant magique, projeté sur un écran blanc. C'est ça le cinoche, comme on aime. Depuis Méliès, on n'a rien fait de mieux.



Je me suis retrouvé dans le froid de décembre sur le Boulevard Saint-Michel. J'avais dans ma poche mon "I-pod" (baladeur numérique, comme on dit à l'Académie Française). Mais je n'avais pas du tout envie d'écouter de la musique car j'avais encore dans la tête les chansons du film.



Avant de prendre le métro à Saint-Michel, je suis tombé sur un petit attroupement. Des passants frigorifiés s'étaient agglutinés pour regarder une demi-douzaine de garçons agiles exécutant un spectacle de "break dance". Des garçons très doués, drôles et visiblement heureux de montrer leurs prouesses.



C'était bien.



C'est bien le Quartier Latin, le samedi soir, finalement.



Dans cette histoire, il y a pour conclure une morale, comme chez Jean de la Fontaine.



Il y a un peu d'espoir. Peut-être ne serai-je pas totalement un "mauvais vieux" ? Enfin, pas tout de suite.

vendredi 14 décembre 2007

Ras-le-bol du Colonel !


Bon, il se casse bientôt, le casse-couilles libyen ?



Ça fait quand même une semaine qu'il encombre le pavé parisien avec ses limousines, ses amazones et les crachats à peine délicats qu'il destine à notre diplomatie.



On en soupé du Colonel, très franchement.



Il a plastronné, emmerdé le monde, bloqué les piétons sur les ponts de Paris pendant qu'il faisait le jobard en passant en dessous à bord d'un bateau-mouche.




Il a aussi parcouru au pas de charge en 30 minutes le Musée du Louvre. Il a ramené sa fraise déconfite à Versailles. Sarko a courbé l'échine à plusieurs reprises devant ce triste clown.




Maintenant, ça suffit, Colonel. Barrez-vous ! Remballez votre tente, regroupez fissa les 400 membres de votre escorte d'opérette. Rentrez à Tripoli, dare-dare !




Si ça vous amuse, au passage, faites une escale en Espagne. C'est ce que vous avez prévu. C'est Zapatero qui vous récupère ce samedi. Allez un peu emmerder les Espagnols. Chacun son tour.



Dîtes donc, Colonel, pendant que j'y pense : est-ce bien raisonnable, dans un pays comme le vôtre, d'aller faire le zouave aussi longtemps à l'étranger ?




Mon Colonel, je vous rappelle que le 1er septembre 1969, à 27 ans, vous aviez mené, avec un groupe d'officiers, un coup d'état contre le roi Idris al-Mahdi, alors que celui-ci était en Turquie pour un traitement médical.



Les absents ont toujours tort, c'est ce que je voulais vous signaler. Le neveu du roi, le Prince Hasan as-Senussi devait s'installer sur le trône le 2 septembre 1969 lorsque l'abdication du roi Idris annoncée le 4 août devait prendre effet.



Dans la journée du 1er septembre la monarchie est abolie, la république est proclamée, et le Prince mis en prison. C'est à ce moment-là que vous vous êtes octroyé l'avancement du grade de capitaine au grade de colonel que vous avez gardé jusqu'à aujourd'hui.



Or donc, Colonel, pendant que vous faites le mariole en Europe, je me demande si des intrigants ambitieux et pernicieux, installés aux portes de votre palais de Tripoli, ne sont pas en train de savonner avec soin le planche du pouvoir auquel vous vous accrochez indûment depuis si longtemps.



Juste une hypothèse. Avouez que ce serait rigolo : Kadhafi renversé chez lui pendant qu'il roulait des mécaniques chez Sarko le magnifique !

lundi 10 décembre 2007

Bové, au trou !


Et revoici l'oiseau de mauvaise augure, l'oiseau nuisible. Revoici le pénible José Bové.


Il a échappé aujourd'hui à la prison, obtenant la transformation en jours-amende de sa condamnation à 4 mois de prison ferme pour un arrachage de maïs transgénique.




Le sinistre individu, déjà condamné par la Justice Française, a aussitôt annoncé une grève de la faim collective pour dénoncer "un simulacre de décret" sur les OGM.



Il fera la grève de la faim après les fêtes de fin d'année. C'est ce qu'on appelle un calendrier militant !


A l'issue d'une audience contradictoire au tribunal de grande instance de Millau (Aveyron), avec ses avocats, le procureur et le juge d'application des peines, le leader altermondialiste a qualifié de "bonne nouvelle" l'aménagement de sa condamnation à 4 mois de prison ferme en jours-amende, dont le montant et le nombre de jours seront connus le 17 décembre.


Il avait été condamné en décembre 2005 par la cour d'appel de Toulouse pour un arrachage de plants de maïs transgénique à Menville (Haute-Garonne) un an plus tôt. Un arrachage illégal, pour ne pas dire terroriste.


L'ancien candidat à l'élection présidentielle s'est toutefois dit "en colère" face à ce qu'il a qualifié de "trahison". Bové est en "colère". Ne le sommes-nous pas tous contre lui ?


L'ancien porte-parole de la Confédération paysanne (qui ne représente plus rien du tout, faut-il le rappeler ?) a déchiré, sous les applaudissements de quelque 70 sympathisants (merci d'être venus…) , une copie du décret suspendant jusqu'au 9 février la vente et l'utilisation du maïs MON 810, le seul OGM cultivé en France.


Il a qualifié cette suspension de "complètement inacceptable, à moins de nous prendre pour des imbéciles". "Tout le monde sait que l'on ne cultive pas du maïs en hiver et décréter par la loi le gel en hiver, c'est vraiment se foutre de la gueule du monde et ça, on ne peut l'accepter!", s'est-il exclamé.


"Nous avons pris une décision collective d'entamer à partir du 3 janvier 2008 une grève de la faim à durée indéterminée pour mettre en place un moratoire sur les OGM, pour que le gouvernement respecte la parole donnée devant l'Assemblée nationale et pour défendre le droit et la liberté de consommer sans OGM", a-t-il poursuivi sur les marches du palais de justice.


José Bové fera donc la grève de la faim après les réveillons ! Nous admirons évidemment son courage !


"Quand la parole publique est bafouée, les citoyens doivent agir. Il faut que l'année 2008 soit une année sans OGM, que le moratoire soit effectif", a insisté José Bové, devant le tribunal où étaient accrochées de chaque côté de l'entrée des banderoles "Faucheurs volontaires d'OGM" et "Moratoire pour les OGM = amnistie pour les faucheurs".


"L'aménagement prévu aujourd'hui va permettre que le combat continue", a souligné l'autoproclamé leader altermondialiste, prétendu agriculteur du Larzac (où il n'a jamais rien cultivé ni élevé par lui-même), avant d'ajouter: "on sera plus efficace dans la rue en faisant une grève de la faim que derrière les barreaux".



Que Bové ne mange ni la dinde de Noël, ni la bûche, je considère que qu'est une bonne nouvelle.



Le seul problème, c'est que le citoyen Bové, délinquant multirécidiviste, n'a jamais prouvé la véracité de ses propos incantatoires contre les OGM.



Ne lui en déplaise, les OGM constituent un progrès scientifique évident, en priorité pour les pays du tiers-monde qui en sont les premiers bénéficiaires.



Le citoyen Bové est un délinquant qui bénéficie de passe-droits inconsidérés en raison de ses vociférations tonitruantes.



Bové au trou. C'est mon souhait le plus cher.



Mais nous sommes en France et les agitateurs, même les plus douteux, les moins pertinents, les plus gros bonimenteurs, bénéficient toujours d'une plate-forme exceptionnelle.



C'est pourquoi, pour l'éternité, nous allons devoir endurer les sornettes fallacieuses de José Bové, énorme menteur et manipulateur.

Le Guide de la grande révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste.


Le 'Guide de la grande révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste' dort ce soir à l'Hôtel Marigny, résidence réservée aux hôtes de passage de la République Française.



Dans le jardin de Marigny, le 'Guide de la grande révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste' a pu planter la grande tente nomade de ses palabres. Pas de chameaux à l'horizon, mais une délégation de 400 personnes.



Georges Pompidou, président moribond en 1973, gonflé à la cortisone, avait déjà reçu le 'Guide de la grande révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste'.



Et, en 1984, François Mitterrand, moins moribond à l'époque, était allé jusqu'en Crète pour serrer la main du 'Guide de la grande révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste'.



En 1985, le même Mitterrand recevait le dictateur Polonais Jaruzelski, dictateur qui avait maté durement la révolte qui grondait contre le communisme et qui a fini par triompher.



Pendant son très long règne, Mitterrand avait aussi reçu à Paris le dictateur cubain Castro, adulé par Danièle Mitterrand, l'épouse du chef de l'Etat Français, épouse mais pas unique compagne. On ment un peu, on ment toujours.



Le même Castro était à Notre Dame de Paris (mais oui !) pour la messe funéraire de feu François Mitterrand.



Alors, Sarko serrant la louche de l'allumé des vrais berbères libyens, je veux parler du 'Guide de la grande révolution de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste' ? Ça me paraît presque anodin.

lundi 3 décembre 2007

"Ici, nous vivons comme des morts"


Un aveu, en passant. Un aveu de lâcheté ou d'insouciance, ce qui revient souvent au même.


Mon aveu : je ne m'étais jamais vraiment passionné pour le sort d'Ingrid Bétancourt, l'otage franco-colombienne détenue dans la jungle par la guérilla des FARC depuis le 23 février 2002. Bientôt 6 ans !


Et puis ce soir, je lis dans "Le Monde" la lettre qu'Ingrid Bétancourt adresse à sa mère qu'elle appelle Mamita.


Le texte date de la fin octobre de cette année. Il est digne et bouleversant.


Voici les extraits de cette missive poignante. C'est un message intime et universel. Un grande leçon d'humanité.




"C’est un moment très dur pour moi. Ils demandent des preuves de vie brusquement et je t’écris, mon âme tendue sur ce papier. Je vais mal physiquement. Je ne me suis pas réalimentée, j’ai l’appétit bloqué, les cheveux me tombent en grande quantité.


"Je n’ai envie de rien. Je crois que c’est la seule chose de bien, je n’ai envie de rien car, ici, dans cette jungle, l’unique réponse à tout est « non ». Il vaut mieux donc, n’avoir envie de rien pour demeurer, au moins, libre de désirs. Cela fait 3 ans que je demande un dictionnaire encyclopédique pour lire quelque chose, apprendre quelque chose, maintenir vive la curiosité intellectuelle. Je continue à espérer, qu’au moins par compassion, ils m’en procureront un, mais il vaut mieux ne pas y penser. Chaque chose est un miracle, même t’entendre chaque matin car ma radio est très vieille et abîmée.


"Je veux te demander, Mamita Linda, que tu dises aux enfants qu’ils m’envoient trois messages hebdomadaires (...). Rien de transcendant si ce n’est ce qui leur viendra à l’esprit et ce qu’ils auront envie d’écrire (...). Je n’ai besoin de rien de plus mais j’ai besoin d’être en contact avec eux. C’est l’unique information vitale, transcendante, indispensable, le reste ne m’importe plus(...).


"Comme je te disais, la vie ici n’est pas la vie, c’est un gaspillage lugubre de temps. Je vis ou survis dans un hamac tendu entre deux piquets, recouvert d’une moustiquaire et avec une tente au dessus, qui fait office de toit et me permet de penser que j’ai une maison. J’ai une tablette où je mets mes affaires, c’est-à-dire mon sac à dos avec mes vêtements et la Bible qui est mon unique luxe. Tout est prêt pour que je parte en courant. Ici rien n’est à soi, rien ne dure, l’incertitude et la précarité sont l’unique constante. A chaque instant, ils peuvent donner l’ordre de tout ranger [pour partir] et chacun doit dormir dans n’importe quel renfoncement, étendu n’importe où, comme n’importe quel animal (...).


"Mes mains suent et j’ai l’esprit embrumé, je finis par faire les choses deux fois plus doucement qu’à la normale. Les marches sont un calvaire car mon équipement est très lourd et je ne le supporte pas. Mais tout est stressant, je perds mes affaires ou ils me les prennent, comme le jeans que Mélanie m’avait offert pour Noël, que je portais quand ils m’ont prise. L’unique chose que j’ai pu garder est la veste, cela a été une bénédiction, car les nuits sont gelées et je n’ai eu rien de plus pour me couvrir.


"Avant, je profitais de chaque bain dans le fleuve. Comme je suis la seule femme du groupe, je dois y aller presque totalement vêtue : short, chemise, bottes. Avant j’aimais nager dans le fleuve mais maintenant je n’ai même plus le souffle pour. Je suis faible, je ressemble à un chat face à l’eau. Moi qui aimais tant l’eau, je ne me reconnais pas. (...) Mais depuis qu’ils ont séparé les groupes, je n’ai pas eu l’intérêt ni l’énergie de faire quoi que ce soit. Je fais un peu d’étirements car le stress me bloque le cou et cela me fait très mal.


"Avec les exercices d’étirement, le split et autres, je parviens à détendre un peu mon cou. (...) Je fais en sorte de rester silencieuse, je parle le moins possible pour éviter les problèmes. La présence d’une femme au milieu de tant de prisonniers masculins qui sont dans cette situation depuis 8 à 10 ans, est un problème (...). Lors des inspections, ils nous privent de ce que nous chérissons le plus. Une lettre de toi qui m’était arrivée, m’a été prise après la dernière preuve de survie, en 2003. Les dessins d’Anastasia et Stanislas [neveux d’Ingrid], les photos de Mélanie et Lorenzo, le scapulaire de papa, un programme de gouvernement en 190 points, ils m’ont tout pris. Chaque jour, il me reste moins de moi-même. Certains détails t’ont été racontés par Pinchao. Tout est dur.


"Il est important que je dédie ces lignes à ces êtres qui sont mon oxygène, ma vie. A ceux qui me maintiennent la tête hors de l’eau, qui ne me laissent pas couler dans l’oubli, le néant et le désespoir. Ce sont toi, mes enfants, Astrid et mes petits garçons, Fab [Fabrice Delloye], tante Nancy et Juanqui [Juan Carlos, le mari d’’Ingrid]. Chaque jour, je suis en communication avec Dieu, Jésus et la Vierge (...). Ici, tout a deux visages, la joie vient puis la douleur. La joie est triste. L’amour apaise et ouvre de nouvelles blessures... c’est vivre et mourir à nouveau.


"Pendant des années, je n’ai pas pu penser aux enfants, la douleur de la mort de papa accaparait toute ma capacité de résistance. Je pleurais en pensant à eux, je me sentais asphyxiée, sans pouvoir respirer. En moi, je me disais : « Fab est là, il veille à tout, il ne faut pas y penser ni même penser ». Je suis presque devenue folle avec la mort de papa. Je n’ai jamais su comment cela s’est passé, qui était là, s’il m’a laissé un message, une lettre, une bénédiction. Mais ce qui a soulagé mon tourment, a été de penser qu’il est parti confiant en Dieu et que là-bas, je le retrouverai pour le prendre dans mes bras. Je suis certaine de cela. Te sentir a été ma force. Je n’ai pas vu de messages jusqu’à ce qu’il me mette dans le groupe de [l’otage] Lucho, Luis Eladio Pérez, le 22 août 2003. Nous avons été de très bons amis, nous avons été séparés en août. Mais durant ce temps, il a été mon soutien, mon écuyer, mon frère (...).


"J’ai en mémoire l’âge de chacun de mes enfants. A chaque anniversaire, je leur chante le « Happy Birthday ». Je demande à ce qu’ils me laissent faire un gâteau. Mais, depuis trois ans, à chaque fois que je le demande, la réponse est non. Ca m’est égal, s’ils amènent un biscuit ou une soupe quelconque de riz et de haricot, ce qui est habituel, je me figure que c’est un gâteau et je leur célèbre dans mon cœur leur anniversaire.




"A ma Melelinga [Mélanie], mon soleil de printemps, ma princesse de la constellation du cygne, à elle que j’aime tant, je veux te dire que je suis la maman la plus fière de cette terre (...). Et si je devais mourir aujourd’hui, je partirais satisfaite de la vie, en remerciant Dieu pour mes enfants. Je suis heureuse pour ton master à New York. C’est exactement ce que je t’aurais conseillé. Mais attention, il est très important que tu fasses ton DOCTORAT. Dans le monde actuel, même pour respirer, il faut des lettres de soutien (...). Je ne vais pas me fatiguer à insister auprès de Loli [Lorenzo] et Méla qu’ils n’abandonnent pas avant d’avoir leur doctorat. J’aimerais que Méla me le promette.


"(...) Mélanie, je t’ai toujours dit que tu étais la meilleure, bien meilleure que moi, une sorte de meilleure version de ce que j’aurais voulu être. C’est pourquoi, avec l’expérience que j’ai accumulée dans la vie et dans la perspective que donne le monde vu à distance, je te demande, mon amour, que tu te prépares à arriver au sommet.



"A mon Lorenzo, mon Loli Pop, mon ange de lumière, mon roi des eaux bleues, mon chief musician qui me chante et m’enchante, au maître de mon coeur, je veux dire que depuis qu’il est né jusqu’à aujourd’hui, il a été ma source de joies. Tout ce qui vient de lui est du baume pour mon coeur, tout me réconforte, tout m’apaise, tout me donne plaisir et placidité (...). J’ai enfin pu entendre sa voix, plusieurs fois cette année. J’en ai tremblé d’émotion. C’est mon Loli, la voix de mon enfant, mais il y a déjà un autre homme sur cette voix d’enfant. Un enrouement d’homme-homme, comme celle de papa (...). L’autre jour, j’ai découpé une photo dans un journal arrivé par hasard. C’est une propagande pour un parfum de Carolina Herrera « 212 Sexy men ». On y voit un jeune homme et je me suis dit : mon Lorenzo doit être comme ça. Et je l’ai gardé.


"La vie est devant eux, qu’ils cherchent à arriver le plus haut. Etudier est grandir : non seulement par ce qu’on apprend intellectuellement, mais aussi par l’expérience humaine, les proches qui alimentent émotionnellement pour avoir chaque jour un plus grand contrôle sur soi, et spirituellement pour modeler un plus grand caractère au service d’autrui, où l’ego se réduit à sa plus minime expression et où l’on grandit en humilité et force morale. L’un va avec l’autre. C’est cela vivre, grandir pour servir (...).


"A mon Sébastien [fils du premier mariage de Fabrice Delloye], mon petit prince des voyages astraux et ancestraux. J’ai tant à te dire ! Premièrement, que je ne veux pas partir de ce monde sans qu’il n’ait la connaissance, la certitude et la confirmation que ce ne sont pas deux, mais trois enfants d’âme, que j’ai (...). Mais avec lui, je devrais dénouer des années de silence qui me pèsent trop depuis la prise d’otage. J’ai décidé que ma couleur favorite était le bleu de ses yeux (...). Si je venais à ne pas sortir d’ici, je te l’écris pour que tu le gardes dans ton âme, mon Babon adoré, et pour que tu comprennes ce que j’ai compris quand ton frère et ta sœur sont nés : je t’ai toujours aimé comme le fils que tu es et que Dieu m’a donné. Le reste n’est que formalité.


"(...) Je sais que Fab a beaucoup souffert à cause de moi. Mais que sa souffrance soit soulagée en sachant qu’il a été la source de paix pour moi. (...) Dis à Fab que sur lui je m’appuie, sur ses épaules je pleure, qu’il est mon soutien pour continuer à sourire de tristesse, que son amour me rend forte. Parce qu’il fait face aux nécessités de mes enfants, je peux cesser de respirer sans que la vie ne me fasse tant mal. (...)


"A mon Astrica, tant de choses que je ne sais par où commencer. Tout d’abord, lui dire que « sa feuille de vie » m’a sauvé pendant la première année de prise d’otage, pendant l’année de deuil de papa (...). J’ai besoin de parler avec elle de tous ces moments, de la prendre dans mes bras et de pleurer jusqu’à ce que se tarisse le puits de larmes que j’ai dans mon cœur. Dans tout ce que je fais dans la journée, elle est en référence. Je pense toujours, « ça, je le faisais avec Astrid quand nous étions enfants » ou « ça, Astrid le faisait mieux que moi ». (...) Je l’ai entendu plusieurs fois à la radio. Je ressens beaucoup d’admiration pour son expression impeccable, pour la qualité de sa réflexion, pour la maîtrise de ses émotions, pour l’élégance de ses sentiments. Je l’entends et je pense « Je veux être comme ça » (...). Je m’imagine comment vont Anastasia et Stanis. Combien cela m’a fait mal qu’ils me prennent leurs dessins. Le poème d’Anastasia disait « par un tour du sort, par un tour de magie ou par un tour de Dieu, en trois années ou trois jours, tu seras de retour parmi nous ». Le dessin de Stanis était un sauvetage en hélicoptère, moi endormie et lui en sauveur.


"Mamita, il y a tant de personnes que je veux remercier de se souvenir de nous, de ne pas nous avoir abandonnés. Pendant longtemps, nous avons été comme les lépreux qui enlaidissaient le bal. Nous, les séquestrés, ne sommes pas un thème « politiquement correct », cela sonne mieux de dire qu’il faut être fort face à la guérilla même s’il faut sacrifier des vies humaines. Face à cela, le silence. Seul le temps peut ouvrir les consciences et élever les esprits. Je pense à la grandeur des Etats-Unis, par exemple. Cette grandeur n’est pas le fruit de la richesse en terres, matières premières, etc, mais plutôt le fruit de la grandeur d’âme des leaders qui ont modelé la Nation. Quand Lincoln a défendu le droit à la vie et à la liberté des esclaves noirs en Amérique, il a aussi affronté beaucoup de Floridas et Praderas [municipalités demandées par les FARC pour la zone démilitarisée]. Beaucoup d’intérêts économiques et politiques considérés supérieurs à la vie et à la liberté d’une poignée de noirs. Mais Lincoln a gagné et il reste imprimé sur le collectif de cette nation la priorité de la vie de l’être humain sur quelque autre type d’intérêt.


"En Colombie, nous devons encore penser à notre origine, à qui nous sommes et où nous voulons aller. Moi, j’aspire à ce qu’un jour, nous ayons la soif de grandeur qui fait surgir les peuples du néant pour atteindre le soleil. Quand nous serons inconditionnels face à la défense de la vie et de la liberté des nôtres, c’est-à-dire, quand nous serons moins individualistes et plus solidaires, moins indifférents et plus engagés, moins intolérants et plus compatissants. Alors, ce jour-là, nous serons la grande nation que nous voulons tous être. Cette grandeur est là, endormie dans les cœurs. Mais les cœurs se sont endurcis et pèsent tellement qu’ils ne nous permettent pas des sentiments élevés.



"Mais il y a beaucoup de personnes que je voudrais remercier car ils ont contribué à réveiller les esprits et à faire grandir la Colombie. Je ne peux pas tous les mentionner [elle cite alors l’ex président Lopez et « en général, tous les ex présidents libéraux », Hernan Echevarria, les familles des députés du Valle, Monseigneur Castro et le Père Echeverri].


"Mamita, hélas, ils viennent demander les lettres. Je ne vais pas pouvoir écrire tout ce que je veux. A Piedad et à Chavez, toute, toute mon affection et mon admiration. Nos vies sont là, dans leurs cœurs, que je sais grand et valeureux. [elle dédie alors un paragraphe de remerciements à Chavez, Alvaro Leyva, Lucho Garzon [ancien maire de Bogota] et Gustavo Petro, puis mentionne des journalistes]. Mon cœur appartient aussi à la France (...). Quand la nuit était la plus obscure, la France a été le phare. Quand il était mal vu de demander notre liberté, la France ne s’est pas tue. Quand ils ont accusé nos familles de faire du mal à la Colombie, la France les a soutenues et consolées.


"Je ne pourrais pas croire qu’il est possible de se libérer un jour d’ici, si je ne connaissais pas l’histoire de la France et de son peuple. J’ai demandé à Dieu qu’il me recouvre de la même force que celle avec laquelle la France a su supporter l’adversité, pour me sentir plus digne d’être comptée parmi ses enfants. J’aime la France de toute mon âme, les voix de mon être cherchent à se nourrir des composants de son caractère national, elle qui cherche toujours à se guider par principes et non par intérêts.


"J’aime la France avec mon cœur, car j’admire la capacité de mobilisation d’un peuple qui, comme disait Camus, sait que vivre c’est s’engager. (...) Toutes ces années ont été terribles mais je ne crois pas que je pourrais être encore vivante sans l’engagement qu’ils nous ont apporté à nous tous qui ici vivons comme des morts.


"(...) Je sais que ce que nous vivons est plein d’inconnues, mais l’histoire a ses temps propres de maturation et le président Sarkozy est sur le Méridien de l’Histoire. Avec le président Chavez, le président Bush et la solidarité de tout le continent, nous pourrions assister à un miracle.


"Durant plusieurs années, j’ai pensé que tant que j’étais vivante, tant que je continuais à respirer, je devrais continuer à héberger l’espoir. Je n’ai plus les mêmes forces, cela m’est très difficile de continuer à croire, mais je voudrais qu’ils ressentent que ce qu’ils ont fait pour nous, fait la différence. Nous nous sommes sentis des êtres humains (...).


"Mamita, j’aurais plus de choses à dire. T’expliquer que cela fait longtemps que je n’ai pas de nouvelles de Clara et de son bébé (...). Bon, Mamita, que Dieu nous vienne en aide, nous guide, nous donne la patience et nous recouvre. Pour toujours et à jamais."



Ingrid Bétancourt.




dimanche 2 décembre 2007

Kaka se pose.


"Kaka sur le trône"



C'est le titre le plus marrant du jour.

Kaka nerveux ?



Non, il ne l'est pas car le footballeur brésilien Kaka, désigné aujourd'hui Ballon d'Or 2007, est délicieux et élégant, plus modeste que moderne.



Et c'est un joli garçon, ce Kaka. Joli Kaka !



Chrétien fervent, le milieu offensif du Brésil et du Milan AC se tient soigneusement à l'écart des mondanités et se soucie peu de son image.



Homme discret, il préfère faire parler son talent sur le terrain, où ses contrôles orientés et ses courses inspirées en ont fait l'un des meilleurs joueurs du monde, sinon le meilleur.



Cela lui suffit pour rafler toutes les récompenses: Ballon d'Or, donc, joueur de l'année pour la FIFPro et meilleur joueur européen en club pour l'UEFA en attendant, certainement, d'être désigné footballeur mondial de l'année par la FIFA.



Ses 10 buts lors de la campagne victorieuse du Milan AC en Ligue des champions ont pesé lourd au cours d'une année sans Euro ni Coupe du monde.


Les amoureux du beau jeu se réjouiront de le voir succéder au défenseur italien Paolo Cannavaro, joueur de devoir, certes, mais tellement moins romantique.


L'année qui s'achève n'a pourtant pas été si rose pour le photogénique Brésilien de 25 ans.


Laissé au repos par le Brésil et absent de l'équipe qui a remporté la Copa America, il a également dû se contenter d'une quatrième place en Serie A après la déduction de huit points infligée au Milan AC pour son implication dans le scandale des matches truqués en Italie.


Cette saison ne s'annonce guère meilleure pour le Milan AC, englué en milieu de tableau du championnat italien et toujours à la recherche d'une victoire à domicile.




Malgré toutes ces difficultés, Kaka a toujours su tirer son épingle du jeu et c'est en grande partie grâce à ses dons que le Milan AC est déjà qualifié pour les huitièmes de finale de la Ligue des champions.


Il marque moins de buts que la saison dernière mais son intelligence de jeu et son sens de la passe font toujours mouche.


Le tourbillon qui l'entoure le change un peu et il apparaît de plus en plus souvent dans des publicités ou sur les magazines. Il lui arrive même de s'exprimer publiquement pour dire, par exemple, qu'il aimerait rejoindre le Real Madrid.


Ce même Real qui avait mis 80 millions d'euros sur la table pour tenter de le débaucher pendant l'été et pourrait faire une nouvelle tentative durant la trêve.


Le Milan, qui sait tenir en Kaka - simple diminutif de Ricardo - un joueur d'exception, pourrait bien faire monter encore les enchères.



Bref, ce Kaka n'est pas une merde.