Vous la sentez aussi fort
que moi, l'odeur rancie du terroir, quand les autochtones
authentiques de souche brandissent l'insulte suprême :
«parachutage». C'est l'argument massue qui doit, en
principe, estourbir toute personne ayant des velléités de se
présenter dans une circonscription législative sans produire au
préalable un arbre généalogique luxuriant qui puisse attester de
racines remontant au moins jusqu'à trois générations.
«Parachutage», c'est l'obstacle que l'on oppose à tout
individu souhaitant postuler au poste de député et qui n'aurait pas
fait sa première communion dans l'église du village.
Misérable
esprit de clocher ! Il ne connait pas nos vaches par leur
prénom, boutons d'ici l'intrus. Dernière menace des "imbéciles qui sont nés quelques part", comme le chantait Brassens. Illustration minable de ce pays
casanier où celui ou celle qui vient du bourg d'à-côté est
considéré comme un étranger. S'il est un peu basané, c'est encore
pire.
La France : moins de
1% de la population mondiale sur 0,4% de la surface du globe. Et on
raisonne encore à l'échelle des cantons...
Un député n'est pas
un élu local. La Constitution le dit clairement. Un député,
élu par la population d'une circonscription, est un élu de la
Nation. Il ne représente pas sa circonscription. Il est, comme les
autres députés, responsable des lois votées pour l'ensemble des
Français. S'il venait à privilégier les intérêts de son
territoire électoral, il commettrait une faute politique.
Comme l'a dit fort
justement Jean-Luc Mélenchon en débarquant dans le Pas-de-Calais :
«Quelqu'un du coin connaît bien... le coin». Mais rien
d'autre au fond. Marine Le Pen n'est pas née à Hénin-Beaumont.
François Hollande n'avait, au départ, aucune attache avec la
Corrèze, pas davantage que Jacques Chirac. François Mitterrand
était arrivé par hasard dans la Nièvre. Jean-Louis Borloo a réussi
à Valenciennes sans y avoir usé ses fonds de culotte d'écolier.
La députation ne trouve pas sa légitimité dans un extrait de
naissance.
Le prochain qui me parle
de «parachutage», je le pousse par la porte de l'avion, sans
parachute...