
Grève des personnels de l'audio-visuel public ! Manif dans les rues de Paris ! Programme minimum sur France-Info qui se met à diffuser du Sibelius à l'heure du déjeuner ! Grand débat très préoccupé sur France-Inter ! L'organe central des bobos de gauche,
"Télérama", n'est pas en reste en nous proposant un épais dossier présenté en couverture sous le titre :
"Non à une télé publique au rabais". Aujourd'hui, la commission présidée par Jean-François Copé tenait sa dernière séance publique avant de remettre son rapport la semaine prochaine. La commission Copé a pour mission de préparer le service public de l'audio-visuel à la suppression de la publicité, suppression décidée, d'un coup de tête, en janvier dernier, par Nicolas Sarkozy.
Je vais ici modestement apporter ma pierre à l'édifice.
D'abord, pour revenir sur la formule de
"Télérama" ("Non à une télé publique au rabais"), je fais remarquer que l'avons déjà, cette télé publique au rabais.
C'est bien France 2 qui emploie depuis des années Patrick Sébastien pour un 'prime-time' putassier du samedi soir.
C'est toujours France 2 qui engage pour l'été (et plus, si affinités) Patrick Sabatier, ressurgi par miracle des bas-fonds cathodiques.
C'est encore France 2 qui embauche à la rentrée Julien Courbet, mis à l'écart par TF1.
C'est ça le service public dont on rêve ? Non, mais c'est celui qu'on nous propose déjà.
Je formule donc ma première proposition : privatiser France 2 qui est déjà un clone médiocre de TF1. Entre médiocres, ils devraient s'entendre.
Pour France 3, la solution est tout aussi évidente. Il faut découper le monstre en petits morceaux. Cette société publique est un mammouth obèse au personnel pléthorique engoncé dans une épaisse couche syndicale. Il faut tailler dans le vif et totalement décentraliser France 3 en créant une dizaine de chaînes ancrées sur un territoire, en liaison avec la presse quotidienne régionale.
Les deux autres chaînes de France-Télévisions (France 4 et France 5) sont probablement les plus intéressantes et elles peuvent constituer le socle d'un service public de qualité qui resterait financé par la redevance. Le rapport qualité/prix de France 4 et France 5 est excellent. C'est de la bonne télé qui n'est pas dispendieuse.
Pour l'Outre-Mer, les programmes de RFO doivent continuer, hélas, à être subventionnés par le contribuable. Un peu plus, un peu moins, les DOM-TOM, ça coûte tellement cher pour être tranquille qu'on ne va pas chipoter pour une telle broutille.
La chaîne Arte, c'est un dossier à part : c'est un condominium franco-allemand. C'est une machine hybride qui, finalement, fonctionne de manière intéressante, pour un budget relativement modeste. Au nom de la construction européenne et comme rempart à la franchouillardise, il faut préserver Arte.
Pour ne pas compliquer les choses, je laisse de côté les autres chaînes qui reçoivent de l'argent public : France 24, Euronews, TV5 Monde.
Un mot tout de même sur le scandaleux furoncle des télés parlementaires : 'Public Sénat' et 'LCP-Assemblée Nationale'. Ce sont deux chaînes à l'audience infinitésimale, mais très dépensières. Ces deux chaînes confidentielles arrondissent avantageusement les fins de mois de gloires passées ou présentes de médiatocratie, à commencer par Jean-Pierre Elkabach qui préside Public Sénat. Ces deux télés parlementaires sont entièrement financées par le contribuable, sans aucun contrôle d'une quelconque autorité. Elles s'autogèrent avec des fonds publics. Ces deux chaînes sont des boulets pour les citoyens mais constituent de juteuses prébendes pour ceux qui passent à la caisse (caisse publique) après être passés devant la caméra.
Alors, je résume.
-France 2 : on privatise sans hésiter.
-France 3 : on découpe et on largue.
-France 4 et France 5 : on garde dans le public parce que c'est plutôt bien fait pour pas beaucoup d'argent.
-L'Outre-Mer avec RFO, on conserve parce qu'avec l'Outre-Mer, il faut toujours raquer pour avoir la paix.
-Arte, c'est un modèle original, pas tellement coûteux, qui mérite d'être perpétué.
-Les chaînes parlementaires : un scandale démocratique, un refuge pour planqués de l'audio-visuel, notre version contemporaine des écuries d'Augias qu'il convient de nettoyer au Kärcher. Dans ce débat, j'avance un autre solution encore plus radicale, inspirée des Etats-Unis. Les Américains disposent d'un magnifique réseau de télé publique : PBS. Et aussi d'un formidable réseau de radio publique : NPR. Pas de pub et pas de redevance pour les Américains. Mais tout de même une télé très exigeante, très culturelle, diffusée dans tout le pays et un réseau de radio de très grande qualité enrichi par de nombreux décrochages locaux ou régionaux. Cette radio (NPR) est en tête des audiences dans certaines villes comme Boston et San Francisco. Et la télé (PBS) offre chaque soir le journal télévisé le plus intelligent qui puisse exister avec, en prime, des documentaires ou des enquêtes exceptionnels. Je citerai par exemple, dans ce que j'ai pu voir, les séries du réalisateur Ken Burns sur la guerre de Sécession ou sur le jazz : des sagas de grande ampleur, d'une grande richesse, diffusées sur plusieurs semaines, comme je n'en ai jamais vu à la télévision française.
La radio et la télévision publiques existent aux Etats-Unis, dans ce pays affreusement capitaliste, horriblement libéral. Cette radio et cette télé existent sans redevance ni publicité. Quel est le secret du financement ? Il est double : le mécénat des grandes entreprises qui, en contrepartie, sont brièvement citées dans les génériques et aussi les dons des auditeurs et téléspectateurs.
Oui, certains Américains donnent volontairement de l'argent pour faire fonctionner une radio et une télé qui correspondent à leurs aspirations.
Belle leçon pour les Français qui râlent dès que l'on évoque une nécessaire augmentation de la redevance audio-visuelle.
La radio et la télé publiques ne sont pas un droit. C'est un service. Ça doit se payer, d'une façon ou d'une autre. Si ça ne vous plait pas, rien ne vous oblige à regarder. Si vous ne regardez pas, si vous renoncez à votre récepteur, on ne vous demandera rien. Sinon, vous payez. Compris ?