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"Rentrée des classes chic et rétro" titre le journal "Le Monde".
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Dans cette période de laisser-aller proche de la décadence, il devient urgent d’organiser une répression drastique, au besoin par le biais d’une déchéance de la nationalité française, contre toute personne utilisant sans vergogne la préposition «sur» devant un nom de lieu, en particulier devant le nom d’une ville.
Voici quelques exemples fautifs qui ne susciteront désormais plus aucune indulgence de la part des autorités politiques et linguistiques :
« Quand reviens-tu sur Lyon ? »
« Ma sœur va s’installer sur Bordeaux »
Qu’on se le dise.
Cet écart a été constaté dans des entreprises de même taille. «Après avoir écarté tous les biais qui auraient pu fausser les résultats, nous arrivons à un écart de rémunération que l'on dit inexpliqué», explique Thierry Laurent, co-auteur de l'étude avec Fehrat Mihoubi.
Seuls les hommes sont concernés par cette discrimination. Les lesbiennes ne subissent apparemment aucune perte de salaire «inexpliquée».
Cette discrimination ne touche pas tous les gays avec la même force. Les moins diplômés et les pls jeunes sont les moins discriminés, alors que l'écart va grandissant avec les diplômes et l'expérience. En proportion de la «visibilité» de l'employé au sein de l'entreprise, analysent les deux économistes. Les jeunes fonctionnaires sont les plus à l'abri, étant peu «visibles» car recrutés sur concours.
Les résultats de l'étude se rapprochent des écarts de salaires observés à l'étranger, mais il faut y ajouter la «prime de mariage» observée en France. Un homme marié gagnera en effet en moyenne 4% de plus qu'un célibataire. Les homosexuels ne pouvant avoir accès au mariage, ils sont doublement pénalisés. Aux États-Unis, selon une étude parue en octobre 2007 et basé sur l'étude de 91.000 cas, un salarié gay gagne en moyenne 23% de moins qu'un homologue hétérosexuel et marié.
Pour compliquer les choses, le quotidien Le Parisien publie parallèlement une enquête sur les prénoms anglo-saxons donnés, dans les milieux populaires, aux enfants nés dans les années 80-90. Il s’agit de ces Kévin, Dylan, Brandon, Shirley, Sandy... Ces prénoms étaient inspirés par les personnages des feuilletons américains de l’époque : Dynastie, Santa Barbara, Beverly Hills 90210, etc. En 1991, Kévin est le prénom masculin le plus donné en France.
Les spécialistes notent qu’à l’école, un élève prénommé Kévin aura toujours une moins bonne note qu’un autre élève prénommé Arthur ou François. A l’embauche, ces prénoms ploucs, très connotés, sont un vrai fardeau sur un CV.
Maintenant imaginons le pire : un jeune homme qui se prénomme Kévin et qui, par ailleurs, est homosexuel... Pas facile.
Good luck, Kévin !
La cigale sécuritaire ayant chanté tout l’été se trouva fort dépourvue quand la bise économique fut venue.
Déployer des escouades policières dans les quartiers chauds de Grenoble et d’ailleurs, expulser des Roms à tire-larigot au cours de l’été, toute cette agitation n’a eu aucun effet sur les indicateurs économiques et sociaux. Ils sont presque tous dans le rouge.
La réunion, hautement médiatisée, a pour cadre le fort de Brégançon, résidence officielle de la présidence de la République, à un jet d’hélicoptère du Cap Nègre où l’actuel chef de l’Etat squatte comme chaque année la propriété estivale de sa belle-famille italienne.
Il y aurait d’ailleurs, à propos du fort de Brégançon, quelques économies à réaliser. Le général De Gaulle détestait l’endroit (il n’y a passé qu’une seule nuit). François Mitterrand n’aimait pas davantage ce lieu. Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing en ont été les plus gros utilisateurs mais Nicolas Sarkozy, depuis le divorce d’avec Cécilia, n’y a pas mis les pieds avant ces quelques heures de réunion protocolaire d’aujourd’hui.
On aimerait connaître la facture d’entretien de cette vaste résidence balnéaire désertée (piscine, plage privée, héliport, etc.) dont la sécurité est assurée, 365 jours par an, par deux pelotons de gendarmerie et deux équipes de la garde républicaine. Brégançon, quartier sensible ?
Mais ce n’est pas le sujet du jour. L’objectif, c’est d’affirmer devant l’opinion et surtout devant les agences de notation financière que le gouvernement de la France est conscient de la fragilité des équilibres du pays et qu’il entend y remédier. Fort bien. Car il y a du pain sur la planche : déficits publics gigantesques, chômage aggravé, compétitivité maladive, croissance anémique. Christine Lagarde plastronne avec une croissance à 0,6% ! Angela Merkel se marre en silence.
C’est dans ce climat économique délabré que Nicolas Sarkozy veut lancer sa réforme des retraites, réforme mal expliquée et mal comprise par l’opinion. Les syndicats et la gauche jouent sur du velours : voici un terrain propice à une vaste mobilisation déjà enclenchée.
Cette réforme, urgente et nécessaire, reste confiée à Eric Woerth, ministre épuisé par un printemps et un été de controverses, animal politique sanguinolent qui parcourt encore l’arène à pas lents, le corps bardé de douloureuses banderilles.
Si cette réforme des retraites est, comme le dit l’Elysée « la plus importante de la fin du quinquennat », pourquoi s’obstiner à la faire exécuter par un homme à ce point décrédibilisé ? Dans n’importe quel pays moderne et responsable, un ministre enfoncé dans les sables mouvants d’un scandale politico-financier de cette envergure aurait été chassé ou aurait démissionné depuis longtemps.
On remarquera que le sieur Woerth, porteur de cette réforme décisive aux conséquences sociales et économiques majeures, n’a pas été convié pour figurer dans le sketch médiatique de Brégançon. Début de disgrâce ? Ne jamais oublier les leçons de l’Union Soviétique : quand tu es effacé de la photo, c’est que tu es déjà mort.
Voilà donc comment se présente l’automne pour le pouvoir en place. Pas glorieux, très incertain.
Vous étiez sorti, vous ? Non ? Alors tant pis, il va falloir rentrer quand même ! C’est la rentrée.
C’est un truc typiquement français : LA RENTRÉE ! Ça n’existe dans aucun autre pays au monde. Il faut dire tout simplement qu’aucun autre pays au monde ne tombe en catalepsie comme le nôtre entre le 14 juillet et le 15 août.
Les congés payés (merci Léon Blum), les 35 heures (merci Martine Aubry) font que la France en été est comme suspendue dans un vide intersidéral.
Tout le monde s’éclipse en même temps, ce qui provoque les inénarrables bouchons, autre spécificité purement franchouillarde. Il n’y a pas de bouchons estivaux en Allemagne, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis ou au Japon. Encore une fois, c’est un syndrome français.
Mais le meilleur, c’est donc la rentrée. Les rentrées, devrais-je dire. Car chacun effectue la sienne en ordre dispersé. La rentrée de Martine Aubry, la rentrée de François Chérèque, la rentrée de Dominique de Villepin, la rentrée médiatique. Elle sera courte pour Laurence Ferrari qui va disparaître en octobre pour cause de parturition – mais elle fera une autre ‘rentrée’ après la naissance du chérubin.
Il y a évidemment la rentrée des classes et, plus tard, la rentrée universitaire. Il y a aussi la rentrée littéraire. On annonce 700 romans cet automne. Pourquoi ne pas les publier au début de l’été quand les gens ont du temps pour lire ? Même remarque pour la rentrée cinématographique. L’été, c’est le festival du navet alors que les spectateurs sont disponibles. Il faut attendre septembre pour voir des films un peu moins nuls.
Bref, tout ce petit monde rentre, rentre dans le rang. Ce qui est magnifique en France, c ‘est qu’on s’accorde très vite une seconde rentrée. C’est en janvier, après les fêtes. Tout le monde rentre encore.
La France est un pays qui adore rentrer. Comment en sortir ?
De toutes les formes de violence, c’est la violence verbale qui est la plus insidieuse. On fait violence en parlant, on blesse avec des mots, on abaisse le niveau de la langue pour avilir. Au delà de l’injure et de l’invective, dans cette violence orale, je ressens la vulgarité qui se répand de manière vertigineuse dans nos rapports quotidiens.
La douce France, temple désormais galvaudé du bon goût, de la mode, des parfums, des poètes et des écrivains délicats est devenue un pays poissard.
Le point culminant de cette vulgarité a été atteint le 19 juin de cette année lorsque le quotidien sportif l’Equipe a titré à la une en caractères énormes : «Va te faire enculer, sale fils de pute». On se souvient qu’il s’agissait de propos prêtés au footballeur Anelka et adressés à l’entraineur national Domenech.
N’épiloguons pas sur la véracité contestée de la citation ni sur les conséquences que ces mots brutaux ont eu sur le parcours désastreux des Bleus en Coupe du Monde. Ce que je retiens avant tout , c’est que ce samedi matin 19 juin, à la devanture de tous les marchands de journaux de France, une expression d’une grossièreté inouïe s’est étalée aux regards de tous. Je le répète : c’est un acte de violence, une dérive dommageable.
Il est vrai que l’exemple vient d’en haut. Sur le même registre, le président de la République s’était illustré au Salon de l’Agriculture de février 2008 en lançant à un visiteur hostile à son égard : «Casse toi, pauv’con !». On remarquera, dans l’apostrophe présidentielle, l’usage du tutoiement, méprisant quand il s’adresse à un inconnu. Quand le chef de l’Etat s’exprime comme un charretier, que peut-on attendre du bon peuple ?
Le bon peuple est malheureusement exposé à la vulgarité quotidienne de la télévision. Et en matière de langage, ce sont les émissions de télé-réalité qui véhiculent la plus massive trivialité.
Le principe est simple : on enferme pendant plusieurs semaines un groupe de jeunes gens dans un huis clos cerné de caméras. Les micros accrochés sur chacun des participants captent les dialogues relâchés de cette belle jeunesse. Ces émissions ne fonctionnent que sur des stratégies de tension. Et la tension débouche sur une diarrhée verbale incontrôlable.
Jadis, dans la télé de mon enfance, on ne disait jamais «merde». Dans les émissions de télé-réalité d’aujourd’hui, on entend le mot de Cambronne à chaque minute, et ce n’est pas le plus corsé !
Ce qui me frappe toujours quand je croise certains groupes de jeunes Français, c’est que la plupart du temps, ils ne parlent pas : ils crient. La surenchère sonore, à coup de décibels, s’allie à un vocabulaire pauvret et démonétisé à force d’excès.
Evidemment, on ne dit plus : «cela m’indiffère». On ne dit même plus : «cela ne m’intéresse pas». On dit : «je m’en bats les couilles». L’expression devient savoureuse quand elle est prononcée par une jeune fille qui ne mesure pas qu’elle ne pourra pas facilement mettre son projet à exécution.
Il y a aussi de la vulgarité et du mépris quand aucun mot n’est prononcé. Récemment, de retour d’un court voyage à l’étranger, j’achète des journaux à mon arrivée à Paris. Derrière la caisse, le vendeur saisit mes journaux, fait l’addition et ne dit rien. J’en suis réduit à consulter la somme sur le cadran de la machine. Je tends ma monnaie. C’est fini. Pas un «bonjour», pas un «merci», pas un «au revoir».
Ça aussi, c’est de la violence, une petite violence qui se résume à un manque de convivialité, à un échange marchand sans chaleur, sans une once d’humanité. A tout prendre, je préfère le sourire artificiellement commercial de la moindre vendeuse ou du moindre serveur aux Etats-Unis.