Je n’ai pas encore eu le courage de regarder «Carré Viiip», le nouveau zinzin télé-réalité de TF1. Je crois que je vais m’en passer. D'ailleurs, même si j'insistais, TF1 me prive définitivement de ce délice : l'émission, gros flop d'audience, est jetée à la poubelle. Ça doit être sympa, l'ambiance, en ce moment, dans les étages supérieurs de la tour de TF1 ! Flop après flop, la maison Bouygues se fissure dangereusement.
Et pourtant, la télé de divertissement bien faite, ça existe. J’ai pris beaucoup de plaisir en découvrant cette semaine les premiers épisodes de la série américaine «Glee».
Cette série connaît un succès phénoménal depuis deux ans aux Etats-Unis sur la chaine «Fox» (à ne pas confondre avec «Fox News» même si les deux programmes font partie de l’empire Murdoch).
«Glee» (traduction : joie, allégresse, jubilation) a pour cadre un lycée dans une petite ville de l’Ohio. Dans les «High-schools» américaines, en dehors des études, les élèves participent à de nombreuses activités sportives et culturelles au sein de clubs. «Glee» est le club de la chorale. Une chorale très moderne : on ne chante pas des berceuses mais plutôt du rock, de la pop et des comédies musicales. Le club «Glee» est méprisé par les costauds des équipes sportives du lycée. «Glee», pour les musclés, c’est un rassemblement de losers, de filles mal dégrossies ou de garçons efféminés.
Dans la série, le club «Glee» est animé par un prof d’espagnol très enthousiaste, en rivalité permanente avec la prof de gym, une blonde énergique et autoritaire, toujours vêtue d’un survêtement Adidas en lycra. Elle n’a qu’un seul but : la disparition du club «Glee» qu’elle considère comme un ramassis de parasites et de dégénérés. Voilà pour la toile de fond sans grande surprise de la série.
Ce qui fait l’intérêt de «Glee», c’est la qualité de la réalisation : un découpage très rythmé, des dialogues bien écrits et de jeunes acteurs tous excellents. Chaque épisode est aussi l’occasion de voir les numéros répétés et réalisés par cette chorale hyper-vitaminée qui danse en chantant. Et là, à chaque fois, c’est réjouissant. Dans ce feuilleton, le savoir-faire du show-biz américain confirme sa suprématie. C'est pour ça qu'on aime Broadway...
La thématique est comparable à celle développée dans le film d’Alan Parker «Fame» (1980), film qui fut ensuite décliné dans une série télévisée à grand succès. «Fame» décrivait le quotidien d’une école de musique, de danse et de théâtre à New York. Comme dans «Glee», on y voyait de nombreux numéros vocaux ou chorégraphiques réalisés par les élèves.
Outre ces numéros qui reviennent régulièrement (tout est calculé : environ toutes les 10 minutes), «Glee» nous propose une galerie de portraits forcément stéréotypés : un handicapé sympathique, une jeune homosexuel qui fait son coming out, une fille noire obèse, un bellâtre qui hésite entre le sport et le spectacle, une asiatique timide. Les problèmes personnels de cette jeunesse sont évoqués sans détours : les relations amoureuses, la grossesse précoce, les différences sociales. Du côté des adultes (les enseignants), les conflits sont exacerbés. Le proviseur est un Indien (pas un Sioux, mais un immigré originaire d’Inde) qui tente de concilier les fortes personnalités de son corps professoral.
Un humour parfois grinçant sauve en permanence les situations les plus prévisibles. La trame, classique pour ne pas dire convenue, est sans cesse remise en cause par un sens aigu du second degré.
Des vedettes se sont précipitées pour faire des apparitions dans «Glee» : Olivia Newton-John, Britney Spears, Gwyneth Paltrow, Madonna et bientôt... Lady Gaga !
Les téléspectateurs américains peuvent voir en ce moment les épisodes de la deuxième saison de «Glee». Une troisième saison est actuellement en préparation.
En France, c’est la chaine M6 qui a acheté la série. Elle est malheureusement diffusée de manière calamiteuse. Mardi soir, M6 a diffusé à la sauvette trois épisodes après 23 heures ! Pourquoi acheter un tel programme, distrayant et tous publics, et l’enfouir dans les tréfonds de sa grille ? Mystère. D’ailleurs, on ne verra plus du tout «Glee» sur M6 qui fait davantage confiance aux lancinantes émissions culinaires et décoratives pour doper ses audiences. Les épisodes suivants seront diffusés (en prime time tout de même !) sur W9, la petite succursale confidentielle de M6 disponible sur le câble, l’ADSL et la TNT. Il s’agit peut-être d’offrir enfin un peu de contenu de qualité à W9 qui en manque cruellement. Prenons-le comme ça. Le pari est réussi car hier soir W6 a attiré beaucoup plus de téléspectateurs que d'habitude.
J’ajoute que le plaisir (simple et pas trop exigeant intellectuellement) de regarder «Glee» est amplifié par la possibilité d’opter pour la version originale en anglais. Le doublage, pour ce genre de programme, est toujours une calamité. On en a la confirmation chaque semaine en regardant «Les Experts» sur TF1. En langue française, c’est peu crédible. Par chance, et ça change tout, on peut écouter les vraies voix des acteurs américains grâce au système multilingue.
Bref, je suis devenu accro à «Glee» en version originale comme je l’avais été à une autre série américaine : «Young Americans». Cette série décrivait l’univers d’une petite université de gosses de riches dans laquelle un étudiant pauvre et méritant tente de s’insérer. Les clichés abondaient mais le tout était magnifiquement réalisé et interprété. Le ton n’était pas à la comédie, plutôt au drame social. Cette série (où l’on ne chantait pas) n’a pas fait long feu : elle a été abandonnée au bout de 8 épisodes seulement. Elle fut diffusée aux Etats-Unis en 2000 et l’année suivante sur M6 en France.
M6 achète parfois de bons programmes mais n’a pas le culot de les valoriser. C’est mon seul regret, en attendant de retrouver «Glee», mercredi prochain sur W9...
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Voici la scène finale de la première saison que nous verrons bientôt :